Victime de chute dans un magasin et charge de la preuve

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Par un arrêt en date du 9 septembre 2020 (Civ. 1re, 9 sept. 2020, n° 19-11.882), la Cour de Cassation revient sur sa position quant à l’obligation générale de sécurité de résultat de l'exploitant d'un magasin à l’égard de sa clientèle.

Il y a trois ans, la Cour de Cassation, suivant arrêt du 20 septembre 2017 (Civ. 1re, 20 sept.2017, n° 16-19.109) , avait mis pour la première fois, à l’occasion de la chute d’un client ayant buté sur un tapis anti-dérapant placé devant le rayon fruits et légumes d’un supermarché, une obligation générale de sécurité de résultat fondée sur le principe de sécurité générale des produits et services issu du Code de la consommation.

En effet, conformément à l’article L 221-1 du code de la consommation, devenu l'article L.421-3 du Code de la consommation " Les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes".

La Cour de Cassation avait ainsi jugé au visa de cet article qu’une entreprise de distribution était débitrice, à l’égard de sa clientèle, d’une obligation générale de sécurité et de résultat.

Par son arrêt du 9 septembre 2020, la première chambre civile de la Cour de Cassation opère un revirement de jurisprudence en énonçant, aux visas des articles 1384, alinéa 1er, devenu 1242, alinéa 1er, du code civil et L 221-1, alinéa 1er, devenu L 421-3 du code de la consommation, que:

" La responsabilité de l’exploitant d’un magasin dont l’entrée est libre ne peut être engagée, à l’égard de la victime d’une chute survenue dans ce magasin et dont une chose inerte serait à l’origine, que sur le fondement du premier des textes susvisés, à charge pour la victime de démontrer que cette chose, placée dans une position anormale ou en mauvais état, a été l’instrument du dommage.

Si le second de ces textes édicte au profit des consommateurs une obligation générale de sécurité des produits et services, il ne soumet pas l’exploitant d’un tel magasin à une obligation de sécurité de résultat à l’égard de la clientèle, contrairement à ce qui a été jugé (1ère Civ. 20 septembre 2017, pourvoi n°16-19.109). "

La Cour de Cassation retourne ainsi à une application stricte de la lettre de l’article L421-3 du Code de la consommation. Elle revient également à l’orthodoxie jurisprudentielle en matière de responsabilité du fait des choses inertes en précisant que pour être indemnisée, la victime devra prouver que la chose est intervenue dans la réalisation du dommage, mais aussi qu’elle était défectueuse ou se trouvait dans une position anormale.

En l’espèce, s’agissant d’un panneau publicitaire métallique sur lequel la victime avait trébuché, la preuve du positionnement anormal du panneau litigieux n’était pas rapportée. La responsabilité du magasin CARREFOUR ne pouvait dès lors être engagée sur le fondement de l’article 1242 alinéa 1er du Code civil.


Il s’agit donc d’un revirement défavorable pour l’indemnisation des victimes, qui se voient réattribuer la charge de la preuve en matière de responsabilité du fait des choses sous la garde de l'exploitant d'un magasin.

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000042348731?tab_selection=juri&searchField=ALL&query=19-11.882&searchType=ALL&typePagination=DEFAULT&sortValue=DATE_DESC&pageSize=10&page=1

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Maître Christin, avocat spécialiste en dommage corporel, est au service de l'indemnisation des victimes.

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